Amyotrophies spinales infantiles autosomiques récessives : découvertes récentes dans les mécanismes génétiques à la base de ces pathologies
par Cédric Castaldi
message posté sur le NG : fr.misc.handicap
le 09 décembre 1999.

Plusieurs publications récentes apportent des informations sur les mécanismes génétiques à la base des amyotrophies spinales infantiles autosomiques récessives. Une abondante littérature, parue ces derniers mois dans la presse scientifique, nous conduit à faire un nouveau point sur l’état actuel des connaissances dans ces pathologies. C’est surtout le gène SMN et les conditions de son expression qui sont l’objet des principaux travaux récemment publiés.

Rappelons tout d’abord que le gène SMN comporte deux copies : l’une dirigée vers le télomère dont les mutations sont responsables de plus de 98% des cas d’amyotrophie spinale infantile (ASI) et une copie centromérique SMNc qui est fonctionnelle chez les patients. Une étroite corrélation existe entre la quantité de protéine codée par SMNc et la sévérité de la maladie. Rappelons aussi que la protéine codée par le gène SMN est associée à une structure nucléaire appelée " gem " qui joue un rôle important dans le processus d’épissage aboutissant à la réalisation de l’ARN.

Le groupe de J. Melki à Strasbourg, aidé par l’AFM, a étudié la région promotrice des deux gènes SMN et SMNc (ou SMN1 et SMN2) et a constaté leur quasi identité (Am.J. Hum. Genet. vol 64 : 1365-1370). Ceci conduit à penser que la différence d’expression des deux gènes résulte soit de la différence de régions régulatrices, soit d’une régulation post-transcriptionnelle. L’identification de facteurs de transcription impliqués dans la régulation de l’expression du gène SMN2 pourrait ouvrir d’intéressantes pistes thérapeutiques. L’étude des chercheurs strasbourgeois a permis d’abord d’identifier des sites de liaison pour plusieurs facteurs de transcription et de plus de trouver dans le promoteur la présence d’un élément régulateur permettant l’induction d’un b-interferon : un IRE. Cette découverte peut avoir d’importantes implications pour la
régulation des gènes SMN1 et SMN2 .

Le groupe de K. Zerres de Bonn (Allemagne) a publié dans le même numéro de la revue Am.J. Hum. Genet.( vol 64 : 1340-1356) des informations résultant de l’étude moléculaire de 42 patients et de 73 parents porteurs hétérozygotes de ces malades. Cette étude avait deux objectifs : établir une corrélation génotype-phénotype et déterminer les implications des mutations pour le conseil génétique. Ce travail a effectivement permis d’établir une corrélation entre le rôle de chaque mutation du gène SMN et aussi avec celui du nombre de copies du gène SMN2 modulant le phénotype. Un important résultat de ce travail est l’observation faite de malades, possédant au moins une copie intacte du gène SMN1. Ceci suggère l’existence d’un autre gène, responsable pour 4 à 5% des cas d’amyotrophie spinale, indistinguables cliniquement des cas classiques. On doit donc suspecter que d’autres gènes comme SIP1, ou d’autres non encore connus, peuvent être responsables de maladie du type ASI. Ceci confirme ce que nous avons précédemment relaté notamment dans le N° 35 des I.S. et pose évidemment un problème quant au diagnostic, notamment prénatal, de cette maladie.

Des chercheurs américains des laboratoires de AHM Burghes à Columbus et de EJ Androphy à Boston ont publié dans Hum. Mol. Genet. (vol 8 : 1177-1283) le résultat du séquençage complet des gènes SMN1 et SMN2 ; Ils ont ainsi établi que les deux gènes différent par 2 nucléotides dans l’exon 7 ce qui ne modifie pas les acides aminés codés, mais peut intervenir dans l’épissage. Dans un second article de la même revue (1219-1226) les chercheurs des mêmes laboratoires publient un autre résultat de leurs travaux sur les facteurs intervenant dans l’expression du gène SMN. Ils ont démontré une interaction entre le gène SMN et un régulateur nucléaire impliqué dans l’expression des papillomavirus appelé E2. L’expression de SMN serait stimulé par E2 cependant que les mutations de SMN inhiberait l’effet de E2. Comme E2 est connu pour intervenir dans la machinerie présidant à la transcription, on peut en inférer que la protéine SMN est impliquée dans le processus d’épissage.En définitive chez les patients ASI la perte du gène SMN1 malgré la présence de SMN2 aboutit à un bas niveau de protéine SMN causant la maladie.

On peut retenir de ces travaux que la protéine SMN intervient bien dans le processus d’épissage comme l’a montré le groupe de G. Dreyfuss. La légère différence entre les gènes SMN1 et SMN2 pourrait expliquer que le second ne pallie pas entièrement l’absence du premier. Ceci a évidemment une grande importance quant aux solutions thérapeutiques envisageables car dans ce cas on ne pourrait sans doute pas corriger le phénotype par une surexpression de SMN2, et il faudrait simplement chercher à convertir SMN2 en SMN1 . Une correction similaire a d’ailleurs été proposée récemment pour la drépanocytose.
 

 


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