Lettres ouvertes aux parents venant d'apprendre un diagnostic
Mary Jane Ausse
Sue Wilcox
June Price
Les articles originaux ont été publiés sur le site Families of Spinal Muscular Atrophy (USA)
Ils sont traduits ici librement de l'anglais.

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De Mary Jane Ausse
 

Chers Parents,

Mon nom est Mary Jane Ausse et je suis atteinte d'ASI de type II.

De quelque façon qu'on vous le dise, entendre que votre enfant est sévèrement handicapé est un coup dévastateur. Mon coeur et mes prières vont à vous, car une route difficile vous attend. Mais, aussi longue et difficile que soit cette route, elle ne manquera pas de soleil et d'arcs-en-ciel... et d'ESPOIR... d'espoir pour la vie la meilleure que votre enfant puisse avoir. Ce qu'elle peut être, nous ne le savons pas vraiment. Vous en tant que parents pouvez seulement encourager et aider le développement de votre enfant.

Certainement, les médecins ne savent pas ce que c'est ! J'ai 51 ans. On a dit à mes parents que je ne vivrai pas jusqu'à la puberté. Mon père n'a jamais vraiment supporté ce message et s'attendait tout le temps à ma mort. Il est décédé il y a maintenant 16 ans.

L'amyotrophie spinale infantile est une maladie très différente suivant les individus, même dans ses prétendues catégories de sévérité. Je n'ai jamais marché, ni me suis tenue debout, ou rampé, je ne me suis jamais habillée seule. Au cours des années, j'ai perdu les fonctions de mon bras, de ma main, de mes doigts et un certain équilibre physique, mais je m'assieds toujours dans mon fauteuil, et je suis capable de taper mes propres messages au clavier, bien que ce soit fatigant.

Cependant, il y a d'autres personnes atteintes de cette maladie qui ont eu un pronostic en même temps que moi mais qui ont perdu l'usage de leurs mains 10 ans avant moi, et qui restent dans un fauteuil roulant adapté. La progression est si différente suivant les cas. Seul le temps le dira.

Les meilleurs conseils que je puisse donner sont : Ne vivez pas chaque jour comme si votre enfant allait mourir. Appréciez son enfance et ses réalisations comme n'importe quel autre enfant. Il n'apprendra peut-être pas à marcher, mais il peut s'avérer être le gosse le plus intelligent de sa classe. En outre, éduquez-le comme un enfant "normal" (si ce mot a un sens). Si vous le gatez trop et avez trop d'indulgence envers lui, il aura à dépasser deux handicaps : un psychologique et l'autre médical. Dans le cas présent, vous avez plus de contrôle sur les aspects psychologiques que médicaux.

Cependant, vous avez vraiment un certain contrôle sur sa santé physique. Il y a des fois (beaucoup de fois) où il est sage d'obtenir une deuxième opinion. J'avais été mal diagnostiquée pendant des années et n'ai pas fait confirmer médicalement l'étiquette d'ASI jusqu'à mes 29 ans. (Plus tôt, j'avais établi un diagnostic moi-même quand je travaillais sur ma maîtrise en conseil en réadaptation et j'avais trouvé en fait ma maladie par un des manuels.) Les médecins ont des egos incroyables et n'aiment pas être relégués au second plan par des parents.

Recherchez pour l'enfant le meilleur équilibre pour sa santé (alimentaire, respiratoire et orthopédique) et surtout, découvrez ce que d'autres parents font pour leurs gosses!

De toute façon, appréciez votre enfant. Considérez-le comme une réelle bénédiction pour apprendre ce qu'est le VERITABLE amour. Croyez-moi, il n'y a rien d'autre. Les douleurs et les déceptions s'équilibreront avec les joies et les triomphes, et vos expériences en tant que parents vous fourniront des millions d'occasions de grandir humainement et spirituellement.

Si vous avez besoin d'une oreille ou d'un coeur attentifs, vous n'avez qu'à me le demander.

Bénédictions à vous et à votre enfant...

Mary Jane Ausse

Mary Jane Ausse (102136.2021@compuserve.com) est l'éditeur associé de Living SMArt, un bulletin bimensuel et sans but lucratif édité par et pour des adultes atteints d'ASI.


De Sue Wilcox
 

Chers Parents,

J'ai parlé avec quelques parents d'enfants handicapés récemment, et je me suis trouvée en quelque sorte frustrée par ce qui semble être une sur-évaluation du problème du handicap. J'ai peur que dans certains cas, les parents soient si désireux "de traiter le handicap" qu'ils oublient qu'ils ont d'abord affaire à un enfant.

Tous les enfants ont besoin de grandir dans la confiance en leur développement, l'amour qui les entoure et les projets qui les concernent pour demain. Aucun handicap ne change cela. Le pronostic pessimiste de beaucoup de maladies neuromusculaires semble mettre sur la voie d'une vie au jour le jour, qu'elle qu'elle soit. C'est un diagnostic difficile à vivre pour les parents parce qu'il semble mettre fin à leur espoir d'une vie pour leur enfant. Mais s'ils prennent le temps de réfléchir sur cette vie et d'en voir le sens et le but, ils la considéreront tout autrement.

Que dites-vous à un enfant handicapé quand il vous demande "vais-je mourir ?" Et bien, la même chose qu'à tous les autres enfants. "Oui, nous allons tous mourir, mais pas aujourd'hui, et pas demain. Probablement un jour, mais pas avant longtemps. Ce que nous devons faire maintenant c'est nous concentrer sur vivre, grandir, aimer, apprendre, et faire du mieux que nous pouvons pour devenir quelqu'un de bien aussi longtemps que nous vivrons. C'est le sens de la vie. C'est notre responsabilité aujourd'hui. Nous parlerons de la vie, pas de la mort."

Beaucoup d'enfants en bonne santé meurent soudainement d'accident ou de maladie, mais avec aucun d'entre eux nous ne parlerions de comment il pourrait mourir demain dans un accident de circulation, ou de comment il pourrait se noyer à sa prochaine leçon de natation. Pourquoi pensons-nous que les enfants handicapés doivent entendre ceci ? Ceci n'est pas "s'occuper du handicap", mais changer la vie en mort. Veuillez ne pas enseigner à un enfant à vivre la vie dans la contemplation de la mort.

"Je ne mentirai pas à mes gosses," était une réponse que me faisait un parent. Mais attendez ! Vous mentez au sujet du Père Noël, de la petite souris des dents de lait, du lapin de Pâques, non ? Vous dites que c'est différent, parce que ces légendes font partie de l'enfance, et enseignent aux enfants à donner, à grandir, et à comprendre le renouvellement de la vie. Oui ! Et la légende que "tout ira bien" est tout aussi importante, probablement plus même, pour que les enfants se sentent rassurés et prêts à relever les prochains défis de leur vie.

Quand un enfant grandit, il aborde naturellement les problèmes pratiques de façon à faire face aux limites liées au handicap, et à ce moment il sera plus approprié de discuter de la nature du handicap et de ce qu'il signifie pour l'avenir. Mais assurez-vous que vous les laissez avoir une vision du futur.

Parlez à chacun de vos enfants - tous vos enfants, handicapés ou pas - de la vie, en projetant sur le lendemain, son développement, sa responsabilité, ses rêves et ses buts. Ce sera un cauchemar pour vous d'entendre le médecin dire, "il ne vivra pas au delà de ses années d'adolescence." Mais vous devez alors vous tourner vers votre enfant et dire : "que veux-tu faire quand tu seras grand ?

Parce que vos enfants sont vivants, vous devez vous projeter dans l'avenir. Laissez-les penser à demain, comme nous le faisons tous . Ne laissez pas la mort les avoir jusqu'à ce qu'elle les prenne. Et jamais ne leur enlevez leurs rêves d'avenir. Vous leur aurez donné la partie la plus importante d'une vie "normale" si vous pouvez faire ceci quel que soit le temps que vous passerez avec eux.

J'écris ceci en tant qu'enfant handicapé adulte, qui a été toujours encouragé à atteindre le lendemain.

Sue Wilcox

Sue Wilcox (swilcox@execpc.com) 48 ans, est mariée, est retraitée en tant que conseil en réadaptation, et est atteinte d'ASI de type III.


De June Price
 

Chers Parents,

Je parle en tant qu'adulte a qui on n'a pas donné d'avenir. Bien qu'on ne m'ait pas dit que je mourrais dans mon enfance, c'était implicite. Il n'y avait jamais de discussion au sujet de "demain," ou "quand tu grandiras." Le sens était clair pour moi : je ne serais plus là.

Quand j'ai atteint le neuvième niveau dans une école orthopédique, la loi a exigé que je ne pourrais rester dans cette classe que jusqu'à l'âge de 23 ans. Le lycée était loin et au-dessus de mes rêves. Mais par une certaine chance (ou un miracle), j'ai fini mes études dans un lycée spécialisé l'année suivante. Pendant mes études au lycée, un professeur se moquait si l'un d'entre nous chuchotait même le mot "université". Nous étions handicapés. Nous allions vivre à la maison avec nos parents jusqu'à ce que nous mourions.

Après le lycée, cela a pris six ans avant qu'un conseiller en réadaptation donne son accord pour m'envoyer à l'université. Ses prédécesseurs avaient été lourds dans leur démenti : "Vous êtes atteinte de myopathie [un mauvais diagnostic]. L'Etat refuse d'investir en vous car vous ne vivrez jamais assez longtemps pour avoir votre diplôme."

On ne s'est pas attendu à ce que je vive, pour travailler, pour réussir. On s'est seulement attendu à ce que je meure. J'ai passé beaucoup de temps à attendre que cela se produise mais j'ai trouvé cette attente tellement ennuyeuse (heureusement) que j'ai décidé de faire quelque chose en cours de route. Ce quelque chose qui a fait ma vie, et la vie d'autres, un peu meilleure.

Aujourd'hui, à 48 ans, je regarde en arrière et je me demande comment ma vie aurait été si on m'avait fait cadeau de l'espoir d'un avenir. Parce que malgré ce que tous les "experts" avaient prévu, je suis toujours là. Les parents et les médecins n'en savent pas plus aujourd'hui, mais ils devraient maintenant.

Donner à votre enfant les espoirs et les rêves qui vont de pair avec un avenir ne vous coûte rien. Ne pas les lui donner peut gâcher sa vie.

June Price

June Price (pricezrite@aol.com) est l'éditeur de Living SMArt, un bulletin bimensuel et sans but lucratif édité par et pour des adultes atteints d'ASI.

 


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